Le scandale des armées secrètes de l’Otan

Quand l’Otan tuait des civils en Europe pour lut­ter contre l’URSS. L’attentat de la gare de Bologne, 85 morts et plus de 200 bles­sés le 2 août 1980. Le 26 sep­tembre sui­vant, 13 morts et 200 bles­sés à la fête de la bière de Munich. Les tue­ries du Brabant, 28 morts dans le sud de la Belgique entre 1982 et 1985. 

Derrière ces crimes, se trou­ve­raient l’Otan, les Etats-​Unis et de hauts res­pon­sables poli­tiques de plu­sieurs pays d’Europe, dési­reux de créer une « stra­té­gie de la ten­sion » pour lut­ter contre l’URSS. On connais­sait l’exis­tence de ces armées secrètes depuis qu’en 1990, le pré­sident du conseil ita­lien Giulio Andreotti avait révé­lé à la Chambre des dépu­tés ce qu’é­tait le réseau Gladio. 

On savait qu’il fai­sait par­tie des réseaux Stay-​behind, cel­lules dor­mantes crées par l’Otan dans plu­sieurs pays d’Europe, dont cer­tains étaient offi­ciel­le­ment neutres, comme la Suisse ou l’Autriche. Ce qu’on igno­rait, ce sont les liens très pro­bables de ces réseaux avec des atten­tats ter­ro­ristes. Parfois attri­bués à l’extrême-​droite (dont des mili­tants furent condam­nés), par­fois à l’extrême-​gauche, par­fois res­tés impu­nis. C’est ce que révèle le film « Le Scandale des armées secrètes de l’Otan », réa­li­sé par le jour­na­liste fran­çais Emmanuel Amara, qui s’ap­puie notam­ment sur les tra­vaux de l’his­to­rien suisse Daniele Ganser. 

Un sang-​froid et une tech­nique digne des ser­vices secrets Au pic de la guerre froide, des groupes d’extrême-​gauche contestent le capi­ta­lisme en jouant de la ter­reur, fai­sant plu­sieurs morts. La thèse de Daniele Ganser, qui est for­mel­le­ment invé­ri­fiable tant que l’Otan né s’ex­prime pas ou que les archives res­tent clas­si­fiées, veut que l’or­ga­ni­sa­tion et la CIA aient choi­si une « stra­té­gie de la ten­sion », à la fois pour décré­di­bi­li­ser l’extrême-​gauche et favo­ri­ser l’é­lec­tion de majo­ri­tés plus sécu­ri­taires, donc de droite. 

En orga­ni­sant des atten­tats meur­triers pour la popu­la­tion civile. Cette thèse est invé­ri­fiable, mais elle est for­te­ment étayée par de nom­breux témoi­gnages dif­fu­sés dans le film. Ainsi, ce poli­cier et cette juge d’ins­truc­tion belges qui racontent en quoi les tueurs (impu­nis) du Brabant étaient des gens dotés d’un sang-​froid et d’une tech­nique digne des ser­vices secrets. 

On a aus­si la sur­prise d’en­tendre le très sul­fu­reux Licio Gelli, grand maître de la fameuse loge maçon­nique P2. Mentor de Silvio Berlusconi, ce nona­gé­naire main­te­nu en rési­dence sur­veillée est la che­ville ouvrière de la plu­part des scan­dales des années de plomb ita­liennes. Le voi­là, entre un détour par la Suisse et par l’Allemagne, qui s’ex­plique sur l’o­ri­gine idéo­lo­gique des membres de ces armées secrètes. Après les révé­la­tions d’Andreotti en 1990, trois pays ont déci­dé de lan­cer des enquêtes par­le­men­taires sur les réseaux Stay-​behind : l’Italie, la Suisse et la Belgique. 

C’est donc dans ces pays que les infor­ma­tions sont les plus nom­breuses, ou plu­tôt les moins rares, tant le secret conti­nue à voi­ler ce qu’on pour­rait bien qua­li­fier de ter­ro­risme d’Etats.

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